Carnet de route

Raid Haute Maurienne
Le 28/04/2025 par Guillaume Bachelier
Dans la série raid foutraque, difficile de faire mieux !!
On vous épargnera l’abandon du raid dans le massif du Mont-Blanc à la dernière minute, la complainte météorologique et quelques buts associés, la litanie des annulations de refuges (y compris pendant le raid !!), la location Airbnb au vol (du jamais vu), les reconfigurations du parcours presque quotidiennes pour s’adapter aux chaleurs caniculaires... Rien ne nous aura été épargné ! Et pourtant, on aura vécu des moments d’exception. De ceux dont on reparlera dans dix ans
.

Après un faux départ pour éviter le port du ciré le dimanche, on rejoue « Bienvenus chez les Ch’tis » le lundi
. On regretterait presque les plans Y ou peut-être Z de la cueillette du pissenlit dans le Périgord. Vous l’aurez compris, on est gonflés à bloc. Haute-Maurienne, nous voilà !

J1 : Bah en fait, ça chausse à la voiture
(oui bon on déchaussera quelques centaines de mètres plus loin mais on a coché la croix !). On évitera même la pluie, accueillis par le soleil qui viendra chatouiller nos pupilles pour nous redonner la foi. Pas trop longtemps non-plus : exit la Grande Aiguille Rousse puis la Levanna Occidentale qui nous aura pourtant fait de l’oeil à la faveur d’un coin de ciel bleu. Pour se faire pardonner, panorama splendide en fin d’après-midi quand le voile fut levé !

J2 : Grand beau
. Traversée vers les Evettes de toute beauté dans des conditions exceptionnelles : neige immaculée et en quantité délirante, une unique trace nous montre le chemin, seuls au monde. Du jamais vu dans ces contrées. Magique. Jusqu’à ce que les nuages et le vent viennent se rappeler à nos bons souvenirs, contrariant une nouvelle fois nos envies de sommet
. Pour se consoler, on ne boudera pas notre plaisir à la descente !


J3 : Une dinguerie. Sans aucun doute LA journée de la saison : pas une fausse note, comme dans un rêve. Partis aux premières lueurs du jour, on dépasse un guide et son client se retrouvant aux avant-postes pour une ascension de l’Albaron qui restera dans les mémoires. Face imposante, arête intégralement en neige, vue à couper le souffle sur les reliefs environnants aux formes généreuses comme jamais... et pas un brin de vent au sommet ! On jubile comme des gosses. Et c’est pas terminé
. Après un rappel sur un Cairn (ils ont de drôles de coutumes dans le coin !!), on s’élance avec un comparse du CAF G (si si !) et ses deux acolytes sur le glacier supérieur du Vallonnet pour une descente sur une moquette parfaite. Ambiance pour le moins unique lorsque nous entrons dans un chaos de blocs rocheux dans lequel il faut cheminer : inoubliable. Les pistes de skis nous assureront même une neige des plus agréables nous menant... à deux pas de la location à Bonneval
. Et pour finir ? On retrouve Laureline pour déguster des douceurs bretonnes (on préfère ces spécialités !), seul resto trouvé ouvert en cette fin de saison. Qui dit mieux ???


J4 : Le plan d’aller rayonner autour du refuge de la Femma étant tombé à l’eau au vu des conditions d’enneigement qui se dégradent vitesse Grand V à basse altitude, on décide de remonter vers l’Albaron... en partant cette fois d’Avérole ! Bah c’est pas la même que la veille. Béton armé, comme il se doit sur ces orientations au printemps, le tout dans un paysage nettement plus fermé. Heureusement, on retrouve la douceur du soleil et les hauts sommets avant un pique-nique 5* sur un rocher débusqué par Laurent AG
. Au vu du risque virant à 3 au-dessus de 2800m, pour cause d’humidification profonde atteignant les couches fragiles des tonnes de neiges tombées lors du retour d'Est, je prends la décision de squeezer la montée finale au sommet par la via ferrata d’une trentaine de mètre (il y a déjà du monde dans la file d’attente) et d’engager la descente pour franchir le goulet avant que ça se gâte. Double mauvaise pioche : au-delà du goût d’inachevé, la neige est nettement moins revenue que la veille à cause d'un petit vent qui refroidit le manteau à haute altitude. Damned... Moralité : ne jamais refaire un truc qui a été magique, surtout si c'était il y a moins de 24h !

J5 : Comment finir un raid aussi plein de rebondissements que celui-ci ? En changeant de crémerie avant que la météo ne se gâte de nouveau, direction Orelle pour aller taquiner l’Aiguille de Polset depuis le haut du télécabine ! De toute évidence, au vu de l’heure d’ouverture et du temps de remontée du vallon, ça a déjà bien chauffé... Bref, coulage de bielle au menu (comme à l’accoutumée dans la fournaise) avant transformation en chippendale, délesté de la corde par Laureline pour se hisser au pied du sommet
. L’ascension de l’Aiguille se fera par un court passage en piolet crampons et deux pas d’escalade, rajoutant une sympathique touche finale à ce raid pour le moins atypique... et éreintant en terme d’organisation !

Laurent², Laureline et Guillaume